©CSJ Oranger en fleurs, mars 2015, Couvent de Mechref,
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Jean 18, 1 – 19, 42 « Il y avait un jardin, et dans ce jardin … »
« 40 Joseph d’Arimathie et Nicodème prirent donc le corps de Jésus, qu’ils lièrent de linges, en employant les aromates selon la coutume juive d’ensevelir les morts. 41 À l’endroit où Jésus avait été crucifié, il y avait un jardin et, dans ce jardin, un tombeau neuf dans lequel on n’avait encore déposé personne. 42 À cause de la Préparation de la Pâque juive, et comme ce tombeau était proche, c’est là qu’ils déposèrent Jésus. » (Jn 19,40-42).
Jean nous a aménagé, aux derniers versets de ce long récit de la Passion, un effet de poupées russes, comme un jeu de piste : l’endroit de la Crucifixion cache un jardin, qui cache un tombeau, qui cache un corps mort parfumé et lié de bandelettes.
Il semble inviter le lecteur à ne pas s’arrêter aux tragiques apparences : la potence vide. Ne fixons plus le lieu de la souffrance et de la mort, mais cherchons un autre corps, non plus ensanglanté mais parfumé, non plus nu mais couvert, non plus écartelé mais lié. En quelques heures, tout a déjà changé. Notre Dieu est le Dieu des Vivants, et donc celui de l’espérance.
L’endroit de la mort cache un jardin, lieu de vie et promesse de fécondité, comme au premier Jardin où il se promenait : « Où t’es-tu caché …? »
À l’intérieur de ce jardin, se trouve un espace vide, neuf et silencieux : le tombeau. L’évangéliste insiste sur la virginité de ce tombeau : « un tombeau neuf dans lequel on n’avait encore déposé personne. » La mort en est totalement absente, aucun cadavre n’est venu le souiller. Le tombeau est neuf, comme les outres et les étoffes des paraboles qui nous obligent à nous débarrasser de l’ancien et du vieux. Cette matrice nous fait penser au ventre vierge de Marie, pourquoi celui-ci ne pourrait-il pas enfanter comme elle, et engendrer à une vie nouvelle ?
Je terminerai cette méditation du Vendredi Saint par un dernier indice de la présence de Jésus : « Ils prirent donc le corps de Jésus, qu’ils lièrent de linges », comme s’ils l’avaient attaché à la terre. Le mot « lier » me rappelle le « lier et délier » chez Matthieu : « Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel » (Mt 18,18). Par les soins, la générosité et l’audace de deux notables Juifs, le corps de Jésus (déposé dans le tombeau) leur est à tout jamais lié. Jésus devient ce lien entre terre et ciel, comme le serment d’une éternelle présence aux hommes qui l’ont aimé et servi, et à toux ceux — qui des siècles après — continuent de s’agréger à la chaine infinie de ceux que Jean appelle les croyants.
Sr Nathalie, communauté de Mechref, Liban, 3 avril 2015
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