Avec Laurent de la Résurrection 2/3
Quarante ans après cet écart n’a pas bougé : « Je me regarde comme le plus misérable de tous les hommes, déchiré de plaies, rempli de puanteur et qui a commis toutes sortes de crimes contre son Roi… Ce Roi plein de bonté et de miséricorde, bien loin de me châtier, m’embrasse amoureusement, me fait manger à sa table, me sert de ses propres mains, me donne les clefs de ses trésors et me traite en tout comme son favori » (Lettre 2 à un conseiller spirituel).
Ce qui a changé, c’est le positionnement de frère Laurent : du trouble à la paix : «… je me trouvai tout d’un coup changé. Et mon âme, qui jusqu’alors était toujours en trouble, se sentit dans une profonde paix intérieure, comme si elle était en son centre et en un lieu de repos » (Lettre 2 à un conseiller spirituel). Pour décrire son expérience, frère Laurent emprunte les expressions de St Jean de la Croix qui invite l’âme à se pacifier, à s’établir dans son repos et dans une paix exempte de tout travail et de toute préoccupation, sinon celle de se laisser conduire par Dieu (Montée du Carmel, Livre 2, 13).
Le combat reste le même, mais ce sont les armes qui ont changé : « … je m’abandonne entre ses mains pour faire de moi ce qu’il lui plaira » (Lettre 2 à un conseiller spirituel). Cette expression revient trois fois sous sa plume, dans la même lettre, et souligne cette remise de lui-même à la volonté, à la miséricorde, à l’amour de Dieu. Dans un des entretiens avec Joseph de Beaufort, Frère Laurent affirme que « La confiance que nous avons en Dieu l’honore beaucoup et nous attire de grandes grâces. Il est impossible, non seulement que Dieu trompe, mais même qu’il laisse longtemps souffrir une âme tout abandonnée à lui et résolue de tout endurer pour lui » (Entretiens 33).