L’incarnation : Que vient faire Jésus ?
Dans une certaine conception, il vient racheter du péché originel. Non, Jésus ne vient pas racheter, il ne vient pas préparer, il vient révéler et entraîner à sa suite. Il vient nous révéler qui est Dieu, et qui est l’homme selon Dieu. Dieu n’est pas le gendarme qui nous attend au tournant de la route pour nous mettre un procès verbal. Dieu n’est pas ce potentat sanguinaire qui réclame la mort de ses ennemis. Çà, comme le dit merveilleusement Freud, c’est le Dieu projection de nos désirs humains. Dieu qui veut la mort de nos ennemis comme nous voulions la mort de nos ennemis, on s’en est servi dans l’histoire, on en a massacré des gens… on n’a pas attendu Daech . Il faut le reconnaître. La conversion commence toujours par la reconnaissance de ses erreurs, de ses fautes, sans cette reconnaissance , il n’est pas possible de se transformer.
Jésus nous révèle qui est Dieu : Dieu est amour. Dieu est Père-Mère. Je lie toujours les deux : Père et Mère. Relire Isaïe, Osée. Il a plus de traits maternels que paternels. Quand la Bible a été écrite, c’était le patriarcat : le mot père… mais les traits sont souvent… « comme une mère qui élève son enfant contre sa joue… » Le Dieu que nous révèle Jésus Christ est « mon Père » et « votre père ». Il nous dit : puisque nous n’avons qu’un seul père, vous êtes appelés à être fils comme je le suis.
Jésus nous révèle, en nous révélant le vrai Dieu, quel est l’homme véritable selon Dieu, c’est à dire la filiation, et donc la fraternité.
Le Notre Père est une prière filiale et fraternelle. L’homme a été créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, mais il a du mal à s’y faire !
Jésus nous révèle qu’est-ce que c’est qu’être à l’image et à la ressemblance de Dieu. Il nous invite à ne pas nous faire Dieu, à ne pas nous prendre pour Dieu, mais, en acceptant nos dépendances, à vivre en alliance avec lui, et de ce fait à devenir plus humains. L’humanité est assez riche pour nous dire quelque chose de Dieu, puisque Dieu, en Jésus Christ s’est fait humain. Donc, la plénitude d’humanité, c’est ce à quoi nous sommes appelés.
Nous savons très bien qu’il y a beaucoup d’inhumanité dans notre monde. Voila l’idolâtrie à combattre. L’idolâtrie de l’argent, l’idolâtrie d’un gourou, toutes les idolâtries qui emprisonnent nos vies. Le pouvoir : dans l’Evangile, le pouvoir et la richesse sont les deux grandes idolâtries. Et, je le répète encore, l’idole réclame toujours des sacrifices humains, des victimes. On immole à Baal, on immole à Mammon, on immole à Astarté. L’argent demande la mort d’un certain nombre d’humains. C’est une exigence de l’idole. Et quand on idolâtre une personne, Hitler, Staline…, il y a des victimes ! C’est systématique, l’idole ne peut pas se passer de victimes humaines. C’est pourquoi c’est un combat permanent à mener. C’est un peu violent, mais c’est ça. Le péché c’est lorsque l’humain veut prendre de force ce que Dieu veut lui donner par amour. Dieu veut nous donner le partage de sa vie. Si nous voulons le prendre de force, en nous divinisant, ou en divinisant quelque réalité que ce soit, nous considérons comme un dû ce que nous avons à accueillir comme un don.
La prochaine fois, nous verrons comment cette incarnation va amener le Christ jusqu’à Pâques. Il va mourir, non pas parce que son Père veut du sang : c’est une conception qui s’entend encore ! Je l’ai retrouvée … C’est comme cela que l’Amérique Latine a été évangélisée : « Vous êtes pauvres, et tout… mais c’est bien… restez le, vous serez récompensés.. mais après, laissez les autres vous exploiter… » c’était cela que ça voulait dire : Vous savez, normalement à cause de vos fautes, à cause de vos péchés, vous devriez être exécutés, vous devriez disparaître, mais Dieu à envoyé son fils pour le faire tuer à votre place… Vous voyez bien que c’est catastrophique ! C’est une conception d’un Dieu sanguinaire qui ne peut pas se passer de sang ! Il peut se passer du sang de tous les hommes, mais il en envoie un pour payer pour tous !
Comme il y en un qui a fait le péché pour tous, il y en a un qui doit payer pour tous !
Vous voyez comme c’est lié. La conception du péché originel fausse, entraîne nécessairement une fausse conception de la vie et de la mort de Jésus. Non ! Jésus est mort parce qu’il est allé au bout de l’amour. C’est très différent. Et il a été assassiné par les hommes, pas par Dieu. Vous voyez comment ça transforme tout. On dit souvent : Si Dieu existait…on ne verrait pas tout ça. Non : si l’homme existait… l’homme véritable, que nous avons tous à devenir, on ne verrait pas tout ça !
A suivre : Comment cette incarnation va amener le Christ jusqu’à Pâques
4 commentaires
C’est une des questions : Est-ce que Jésus est le fils de Dieu, au sens strict du terme ou pas ?
Là, il y a une ambiguïté. St Paul, je crois que c’est dans la lettre aux Romains, dit qu’il est devenu Dieu par sa résurrection… c’est le seul texte, mais il y est. Je pense que dès le départ, quand même, dès les plus anciens récits, on a une trilogie en Dieu. On l’a même déjà en Egypte. Le fait de trois éléments, ça se retrouve dans beaucoup de religions, mais Israël a été très fortement marqué par l’Egypte. On a emprunté beaucoup. Les récits de création sont parfois, dans certains points très inspirés par le mythe de Gilgamesh et d’autres, mais on ne peut pas entrer dans tous ces détails. Dans ce que nous appelons l’Ancien Testament, je préfère dire l’ancienne Alliance, c’est le même mot, testament veut dire alliance, il y a toute une préparation et toute une annonce. On sent une montée. C’est le messianisme, qui prend des tonalités différentes : le messie roi, le messie prêtre, le messie prophète. Jésus n’assumera que le prophétisme. Roi, il l’acceptera une fois, à la croix. Donc, un roi totalement désarmé, qui n’a que la croix pour trône, etc.…. Prêtre, jamais. Jésus ne s’est jamais prétendu prêtre. Prophète, oui, et même le grand prophète, annoncé par Moïse. Vous avez un seul texte où Jésus est prêtre, c’est la lettre aux hébreux, mais totalement démarqué des prêtres cultuels. Il est prêtre selon Melchisédech. Melchisédech, on a deux versets dans toute la Bible. « Melech », c’est le roi, « Sedech », c’est la paix, roi de paix. Il est roi de Bethléem, la maison du pain. Abraham qui rentre d’une campagne contre 4 rois, paie la dîme à ce personnage, qui apparaît, qui disparaît, qui est sans généalogie, qui est un épiphénomène, mais Abraham lui rend hommage, s’humilie devant lui, lui paie la dîme. Donc un personnage à la fois considérable et totalement inconnu. Jésus est prêtre selon Melchisédech, c’est-à-dire totalement débarrassé de tous les attributs des prêtres de l’ancien testament.
A mon avis, on est loin d’en avoir tiré toutes les conséquences !
Est-ce que Dieu a ce projet là, de se dire je vais leur envoyer un prophète, mon fils, ou bien est-ce que finalement, il nous laisse, nous, et à certains moments de l’histoire, il y en a qui émergent. On est tous appelés à émerger. Jésus est un homme qui a compris qu’il pouvait aller encore plus loin, qui a accepté d’aller encore plus loin que les autres.
Pour Paul, c’est clair : Paul, apôtre de Jésus Christ, aux saints qui sont à Rome… aux saints qui sont tous les croyants. Dieu seul est Saint, mais il nous fait partager sa sainteté. C’est toujours pareil, on est dans le « recevoir ». Accueillir le don : La sainteté, ce n’est pas une question de « il faut par tous les moyens y arriver » : là, on se crispe. Non, se laisser faire. Le beau texte : l’esprit d’enfance de Thérèse de Lisieux, magnifiquement dit par Mounier, qui dit : au fond, la sainteté, c’est de rester comme un enfant entre les mains de Dieu. Et puis, qu’il nous élève un peu plus haut, un peu plus bas, ça, ça le regarde., c’est son affaire. Il y en a certains qu’il va élever à un certain degré, pour être plus témoins que d’autres, mais voila, il y ales petits, et tout. L’important c’est d’être comme un enfant entre les mains du Père. Je trouve ça très beau.
Qu’est-ce que c’est que la sainteté ?