Connaissance de soi & Vérité
C’est avec grande joie que nous nous sommes retrouvés au Carmel de Mechref, autour de l’enseignement de sainte Thérèse d’Avila sur le thème de « connaissance de soi et vérité ». Une assemblée rajeunie par la présence de l’aumônerie de Damour et du groupe « Jésus ma joie ». Un frère carme, un couple d’amis espagnols complétaient cette assemblée d’une trentaine de personnes.
L’exposé du P. Georges (en 5 points : 1- la découverte du monde intérieur, 2- l’expérience intime de l’amour de Dieu, 3- la mission, 4- notre péché révélé, 5- la connaissance de nos dons et charismes) a été précédé d’un temps silencieux d’oraison et suivi d’un temps de partage en ateliers (qui permet l’expression personnelle et l’approfondissement en petits groupes des questions soulevées par le texte et de la croiser avec notre propre expérience spirituelle).
C’est l’eucharistie, à midi, qui couronne notre rendez-vous. Le P. Georges a fait son homélie en commentant la parabole des 10 vierges (Mt 25, 1-13), à l’aide de l’enseignement thérésien, à savoir que l’huile n’est autre que l’image de la présence du bien-aimé en nous et que la seule chose qui compte durant la veille de son retour est notre amitié pour lui et avec lui, dans un don réciproque… car alors seulement notre désir de le voir aura préparé le face à face. Si Dieu est en nous, il n’est pas un étranger ! Nous ne pouvons pas ignorer Celui qui doit être notre bonheur éternel.
Nous nous sommes retrouvés ensuite pour un temps convivial autour de quelques spécialités libanaises et d’un repas partagé.
—> Deux nouveaux rendez-vous à inscrire dans nos agendas :
le 8 décembre avec saint Jean de La Croix
—> Synthèse de l’exposé du P. Georges :
Dans notre monde matérialiste, il est difficile de parvenir à une connaissance de l’homme. Et même chez les spécialistes de la connaissance de l’homme — dans le monde le la philosophie, de la psychologie — qui ont essayé de le comprendre, souvent ils le réduisent au désir, aux désirs pulsionnels, à la volonté de puissance ou de consommation.
Alors que l’on ne peut pas comprendre l’homme sans Dieu. Le Christ est révélateur non seulement de Dieu son Père « qui me voit voit le Père » (Jn 14,9), mais il est le révélateur de l’homme et de son mystère. On ne peut pas comprendre la grandeur de l’homme sans le Christ. Thérèse d’Avila nous conduit sur ce chemin de la connaissance de soi et de la vérité de l’homme.
1/ D’abord il y a la découverte du monde intérieur. Elle dit souvent que l’on ne connaît l’homme que par les murs extérieur du château (elle compare l’homme à un château de sept demeures), que nous ignorons le monde intérieur que nous sommes, que nous sommes le « temple de Dieu » (1Co 6,19), que le ciel est d’abord une vérité intérieure. Elle dit que là où est Dieu, là est le Ciel. Dieu est à l’intérieur. Mais, on ne peut pas entrer en ce monde intérieur sans la clef de la prière. C’est à l’aide le la prière que l’on découvre ce monde et que l’on y chemine, puisque l’homme est un temple on me peut y rentrer que comme « adorateurs » de Dieu (Jn 4,23), comme des hommes d’oraison et de prière. Découvrir ce monde intérieur avec toute cette largeur… Et là, on trouve la satisfaction de nos désirs les plus profonds (la paix, la joie, l’amour… la douceur, la patience, la fidélité, la bienveillance, la foi, la maîtrise de soi), c’est dans cette relation intime avec Dieu. Chercher l’intériorité, non comme une introspection (un monologue avec soi), mais être avec soi-même comme rencontre avec Dieu qui est à l’intérieur.
2/ Un deuxième aspect de cette connaissance de soi est de connaître l’amour. Il y a au moins deux manières de le connaître, connaître en lisant, c’est-à dire rationnellement, et le connaître à travers l’expérience, ce que l’on appelle la « connaissance mystique ». Même si parfois le mot « mystique » fait peur… c’est-à dire une connaissance à travers l’expérience. Connaître l’amour de Dieu comme une information nous l’avons tous, mais le connaître l’amour de Dieu comme expérience, c’est là le changement dans nos vies, et même qui fait une révolution dans nos vies. Apres cette connaissance, dit Thérèse, nous ne sommes plus les mêmes. Elle nous fait fouler aux pieds tous les honneurs, toutes les richesse, et toutes les gloires du monde ; lorsque nous cherchons normalement dans la vie l’argent, être fameux, être célèbre, l’honneur… Avec l’expérience de l’amour de Dieu, tout cela n’a plus de sens et devient insignifiant. Tout ce que le monde appelle grandeurs s’écroule devant cette connaissance. Cette connaissance nous fait désirer le Ciel. L’amour de Dieu est tellement beau que je veux être uni à cet amour. Elle dit même que continuer à vivre devient un fardeau, nos occupations et obligations deviennent des fardeaux, et elle parle aussi de la blessure de l’amour, que cet amour nous cause une blessure. Normalement, lorsque l’on parle de blessure on parle des blessures causées par le manque d’amour, alors que pour Thérèse cette blessure est causée par un excès d’amour. L’excès d’amour nous blesse, mais cette blessure nous guérit de toutes les blessures du manque d’amour, et nous donne la force pour cheminer et entamer ce chemin qui conduit à la transformation et à l’union avec Dieu. C’est une connaissance qui dépasse toute connaissance selon saint Paul.
3/ Le troisième aspect et de connaître notre rôle, c’est-à dire connaître la mission, la volonté de Dieu sur nous. Et cela nous donne le sens de vivre. Parce que la première connaissance (celle du monde intérieur), si je connais que Dieu est là, alors j’aimerais que ma vie se passe dans un ermitage. Si je connais cet amour, qui arrive à sa plénitude qu’après cette vie, alors la vie n’a pas de sens et je cherche et attends cette rencontre. C’est pourquoi le troisième aspect de la connaissance de soi est la mission : pourquoi suis-je là ? Quel est mon rôle ? Et ce rôle ne peut être compris qu’à la lumière de l’amour. Je suis là pour les autres, comme Thérèse d’Avila le dit pour sauver une vie, ou en perdre mille pour en sauver une, cela vaut la peine ! Si je peux renaître mille fois et mourrir mille fois pour sauver une âme, cela vaut la peine ! Et c’est là le sens de la vie, vivre pour…, pour faire le bien, pour être utile même pour une âme. Si toute ma vie donne vie à une âme, alors ma vie est pleine, ma vie a un sens, est réussie.
4/ Un autre aspect de cette connaissance de soi, c’est connaître les ombres, Thérèse parle des reptiles du château, c’est-à-dire connaître notre péché. C’est une connaissance aussi importante que la première. Cette connaissance de nos faiblesses, de notre péché n’est pas une connaissance déduite à travers la loi, mais c’est une illumination, car c’est la rencontre avec la Lumière qui me fait voir les ténèbres en moi. Et je peux très bien voir que ses ténèbres ne font pas partie de moi, ce sont des reptiles dans ce château. Elles viennent de l’extérieur, elles ne font pas partie de notre être. Pour cela c’est une connaissance libératrice, de savoir que ce qui est négatif n’est pas de moi, ne fait pas partie de moi et avec la grâce je peux en être libéré. Cette quatrième connaissance produit l’humilité, et Thérèse nous parle de deux genres d’humilités : la vraie humilité c’est une connaissance de soi, de nos péchés qui nous remplit de paix et d’espérance parce que je vois ce qui est négatif en moi à la lumière de l’amour de Dieu. Mais elle nous dit de faire attention à la fausse humilité. La fausse humilité c’est connaître mes péchés, connaître ce qui est négatif, les ombres, les ténèbres en moi, et entrer dans le désespoir ou dans le trouble intérieur… Elle nous dit que cela ne vient pas de Dieu ! La connaissance qui vient de Dieu nous libère, je me connais moi-même mais je suis libre et je suis en paix.
5/ Enfin le dernier aspect de cette connaissance, connaître les dons de Dieu, les charismes et les dons de l’Esprit Saint… Dieu nous donne beaucoup de charismes : la vie de Thérèse est pleine de charismes et de dons de l’Esprit (le don de force, de lumière…). On a besoin de reconnaître ces dons pour pouvoir mener jusqu’au bout notre mission et pour cheminer sur ce chemin de l’union avec Dieu, avec tous ses don de l’Esprit. Et Dieu est prodigue en ses dons. Mais il nous faut les reconnaître au sein de cette amitié avec lui, de cette relation de prière avec lui.
—> Texte de Thérèse proposé à notre méditation et travail en groupe
Première Demeure, chapitre premier, paragraphes 1-2.