Notre « différence » est un facteur de richesse mutuelle et non de séparation
Alors que les chrétiens vont évoquer pendant toute une année le séisme que fut la Réforme en son temps, deux amis protestants nous partagent leur vision…
Nous sommes protestants, membres d’une communauté rattachée à l’Union des Églises évangéliques libres de France. Cette Union d’Églises a une tradition d’ouverture et collaboration avec d’autres communautés, aussi bien protestantes qu’avec l’Église catholique. Une devise attribuée à l’un des fondateurs énonce ainsi son identité : « Dans les choses essentielles, fidélité ; dans les choses secondaires, liberté ; en toutes choses charité. »
Le nom de cette Union d´Églises fait référence aux convictions évangéliques de ses fondateurs et à leur choix de rester « libres » vis-à-vis de l’État, à l’époque où l´Église réformée était soumise au Concordat. En 1849 des courants dits « libéraux » remettaient en question les grandes vérités bibliques auxquelles les protestants évangéliques étaient attachés. Le choix de fonder une nouvelle famille d’Églises paraît bien radical à nos ami(e)s catholiques. Il n’est pas du même ordre que la rupture qui se produit en 1517 quand Luther affiche ses 99 thèses. Les différentes communautés protestantes se reconnaissent un « ADN » commun et le passage de l’une à l’autre se fait souvent à l’occasion d’un déménagement ou d’un désaccord sans grande importance.
Une des nombreuses découvertes que notre relation avec le Carmel Saint Joseph nous a permis de faire est que, alors que si un protestant n’est pas content avec un choix, même mineur, de son Église, il changera de paroisse ou même créera une nouvelle Eglise, les catholiques peuvent avoir un désaccord majeur sur un point de doctrine sans remettre en cause leur appartenance à l’Église.
Nous sommes en contact avec le Carmel Saint Joseph depuis 2003 pour Asun et depuis fin 2005 pour Manuel. Notre relation avec les sœurs de la congrégation est devenue rapidement une relation de grande amitié, mais nous avons aussi développé une relation de fraternité et d’échanges par rapport à notre foi. Nous avons appris à apprécier notre foi commune, et à gérer nos différences, à réaliser combien ces différences étaient bien moindres que ce nous avions imaginé, bien qu´elles existent. Lors d’une session sur le dialogue inter-religieux organisée par la congrégation et qui a eu lieu au sein de la communauté de Mechref, au Liban, le père maronite Fadi Daoud disait qu’il fallait éviter de parler d’identité collective, que l’identité était seulement individuelle, et qu’il fallait se référer à des appartenances (et non à des identités) quand nous parlions des liens avec l’Église catholique ou tout autre Église.
En fait nous avons appris que souvent les différences venaient plus de la culture, du vocabulaire utilisé et de la démarche dans l’étude de la Parole, que dans les convictions elles-mêmes.Mais, comme nous le disions plus-haut, les différences existent. Les théologiens qui les ont travaillées ont pu se mettre d´accord sur des formulations qui ont permis de rapprocher leurs positions. Ce qui reste, à notre avis, est la position de la Bible comme seule source de révélation, et la non-reconnaissance de l’autorité de l’Église en tant qu’institution. Comme dit un dicton « chaque protestant est un pape » !
Notre relation avec les sœurs du Carmel Saint Joseph est un privilège et une bénédiction de Dieu. Nous avons l’impression que parler d’œcuménisme est très réducteur, tant notre relation est forte spirituellement et humainement. Il y a quelque temps une amie nous a demandé si les sœurs n’essayaient pas de nous « ramener au bercail ». Je lui ai dit non sans hésitation ! Notre « différence »est un facteur de richesse mutuelle et non de séparation et contribue au côté exaltant de cette relation.
Manuel et Asun Calvo, amis protestants du Carmel Saint Joseph.
Un commentaire
Merci Manuel et Asun pour votre heureux témoignage comme parabole de communion pour nos Eglises.
Anne Marie.