RETRAITE AVEC NOS SŒURS DU PROCHE ORIENT
Mechref, 22 au 28 août 2020 avec P. Georges Abi Saad
Jour 7_Avant-Midi_Vendredi 28 août 2020
Avec cette deuxième époque de la mission d’Ezéchiel, nommé le message d’espérance, nous commençons à percevoir une certaine vision pascale ; il y a une promesse de vie abondante après cette grande souffrance de l’exil. C’est la Pâque du peuple à travers la Croix (on retrouve ici le langage du NT). Il ne s’agit plus de prophéties comme Isaïe 53 qui parle de la souffrance ; mais c’est l’expérience du peuple même. Saint Paul nous dit que la Croix est un scandale pour les juifs :
« Nous, nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes » (1Co 1, 23).
C’est difficile d’accepter un Messie crucifié mais l’histoire prépare à la croix, à cette vision de la croix et de la résurrection. Ezéchiel annonce ce temps nouveau : il a parlé du renouvellement du cœur ; il annonce une nouvelle relation avec Dieu ; une proximité nouvelle de Dieu vis-à-vis de son peuple.
Nous choisissons deux textes pour la méditation : Pour cette matinée : Dieu comme Pasteur Ez 34, 1-25.
Pour cet après-midi : la dernière partie de la seconde prédication. Ezéchiel décrit comme une annonce le temple reconstruit avec tous les détails.
Ez 34, 1-25 : Dieu, Pasteur de son peuple.
01 La parole du Seigneur me fut adressée : 02 « Fils d’homme, prophétise contre les bergers d’Israël, prophétise. Tu leur diras : Ainsi parle le Seigneur Dieu : Quel malheur pour les bergers d’Israël qui sont bergers pour eux-mêmes ! N’est-ce pas pour les brebis qu’ils sont bergers ? 03 Vous, au contraire, vous buvez leur lait, vous vous êtes habillés avec leur laine, vous égorgez les brebis grasses, vous n’êtes pas bergers pour le troupeau. 04 Vous n’avez pas rendu des forces à la brebis chétive, soigné celle qui était malade, pansé celle qui était blessée. Vous n’avez pas ramené la brebis égarée, cherché celle qui était perdue. Mais vous les avez gouvernées avec violence et dureté. 05 Elles se sont dispersées, faute de berger, pour devenir la proie de toutes les bêtes sauvages. 06 Mon troupeau s’égare sur toutes les montagnes et toutes les collines élevées ; mes brebis sont dispersées dans tout le pays, personne ne les cherche, personne ne part à leur recherche. 07 C’est pourquoi, bergers, écoutez la parole du Seigneur : 08 Par ma vie – oracle du Seigneur Dieu –, puisque mon troupeau est mis au pillage et devient la proie des bêtes sauvages, faute de berger, parce que mes bergers ne s’occupent pas de mon troupeau, parce qu’ils sont bergers pour eux-mêmes au lieu de l’être pour mon troupeau, 09 eh bien, bergers, écoutez la parole du Seigneur : 10 Ainsi parle le Seigneur Dieu : Me voici contre les bergers. Je m’occuperai de mon troupeau à leur place, je les empêcherai de le faire paître, et ainsi ils ne seront plus mes bergers ; j’arracherai mes brebis de leur bouche et elles ne seront plus leur proie. 11 Car ainsi parle le Seigneur Dieu : Voici que moi-même, je m’occuperai de mes brebis, et je veillerai sur elles. 12 Comme un berger veille sur les brebis de son troupeau quand elles sont dispersées, ainsi je veillerai sur mes brebis, et j’irai les délivrer dans tous les endroits où elles ont été dispersées un jour de nuages et de sombres nuées. 13 Je les ferai sortir d’entre les peuples, je les rassemblerai des différents pays et je les ramènerai sur leur terre ; je les ferai paître sur les montagnes d’Israël, dans les vallées, dans les endroits les meilleurs. 14 Je les ferai paître dans un bon pâturage, et leurs prairies seront sur les hauteurs d’Israël. Là, mes brebis se reposeront dans de belles prairies, elles brouteront dans de gras pâturages, sur les monts d’Israël. 15 C’est moi qui ferai paître mon troupeau, et c’est moi qui le ferai reposer, – oracle du Seigneur Dieu. 16 La brebis perdue, je la chercherai ; l’égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la panserai. Celle qui est malade, je lui rendrai des forces. Celle qui est grasse et vigoureuse, je la garderai, je la ferai paître selon le droit. 17 Et toi, mon troupeau – ainsi parle le Seigneur Dieu –, voici que je vais juger entre brebis et brebis, entre les béliers et les boucs. 18 Ne vous suffit-il pas de paître dans un bon pâturage ? Faut-il encore que vous fouliez aux pieds ce qui reste du pâturage ? Ne vous suffit-il pas de boire une eau limpide ? Faut-il que vous troubliez le reste avec vos pieds ? 19 Ainsi mes brebis doivent paître dans ce que vos pieds ont foulé, et boire l’eau que vos pieds ont troublée. 20 C’est pourquoi, ainsi parle le Seigneur Dieu : Voici que moi-même je jugerai entre la brebis grasse et la brebis maigre. 21 Parce que vous avez bousculé du flanc et de l’épaule toutes celles qui étaient malades, et que vous leur avez donné des coups de corne jusqu’à les disperser hors du pâturage, 22 je viendrai au secours de mes brebis et elles ne seront plus une proie ; je jugerai entre brebis et brebis. 23 Je susciterai à leur tête un seul berger ; lui les fera paître : ce sera mon serviteur David. Lui les fera paître, il sera leur berger. 24 Alors moi, le Seigneur, je serai leur Dieu, et mon serviteur David sera prince au milieu d’elles. Je suis le Seigneur, j’ai parlé. 25 Je conclurai avec mes brebis une alliance de paix, je supprimerai du pays les animaux féroces, elles habiteront en sécurité dans le désert et dormiront dans les forêts.
Ce texte est un jugement porté sur les chefs du peuple et une promesse. Il faut noter que les pasteurs dont parle Ezéchiel sont les chefs politiques du peuple, plutôt que les chefs religieux (Nous pouvons appliquer cette parole sur les chefs religieux, mais dans ce contexte, il s’agit des chefs politiques). À l’époque, les chefs religieux n’avaient pas un grand rôle en dehors du culte. Après l’exil, avec les Maccabéens, les prêtres ont pris un rôle dans le gouvernement du peuple, la responsabilité du peuple.
Ezéchiel parle des chefs, des rois. Il dénonce leur corruption : abus du pouvoir, exploitation des pauvres, égoïsme, inconscience, irresponsabilité (c’est très actuel). Les conséquences de leur conduite sont graves : un peuple dispersé (répété plusieurs fois), maltraité et sans protection, laissé aux puissances voisines… ; alors que les chefs doivent protéger le peuple. Leur conduite irresponsable a des conséquences sur le plan religieux : Mon troupeau s’égare sur toutes les montagnes et toutes les collines élevées ; L’histoire nous montre comment le peuple suit le roi dans son idolâtrie. Le roi dans sa position a une grande influence au niveau de la religion et de la foi. De nos jours, l’influence est minime mais elle reste là. Nous remarquons à quel point les chefs religieux, politiques influencent même la conduite de ceux qui les suivent (prenons comme exemple, notre contexte libanais chrétien… la haine qui existe entre les différents jeunes des partis politiques chrétiens… où est le Christ ? où est l’Evangile ?… la référence est le chef religieux… une grande déviation…).
Le prophète parle des brebis qui ont besoin d’une attention spéciale, d’un soin particulier : les blessés, les égarés, les perdus… tous ont besoin d’un pasteur qui fait attention, qui se sacrifie pour les aider : La brebis perdue, je la chercherai ; l’égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la panserai. Celle qui est malade, je lui rendrai des forces. Celle qui est grasse et vigoureuse, je la garderai, je la ferai paître selon le droit. Il y a une attitude d’amour, du don de soi….
Ezéchiel dresse aussi le profil d’un chef politique selon le cœur de Dieu : quelqu’un qui se donne ; il fait attention en se donnant pour le bien de ses brebis. Le peuple est responsable de bien choisir les chefs.
Mais, Dieu va abolir la royauté. Après l’exil, on n’a plus les rois en Israël. C’est la fin de la royauté. La royauté était un échec (Bien sûr il y a des moments de lumière comme quelques moments du règne de David). Dieu abolit la royauté mais donne une promesse : sa royauté devient plus spirituelle.
La promesse : Dieu va intervenir pour prendre en charge ses brebis. Il va être le Pasteur. Il va rassembler ses brebis dispersées, Il va prendre soin d’elles… tout ce que les pasteurs n’ont pas fait, Il va le faire. Cette attitude exprime sa proximité, son amour et sa miséricorde.
Nous notons une autre promesse qui reste une énigme : Je susciterai à leur tête un seul berger ; lui les fera paître : ce sera mon serviteur David. Lui les fera paître, il sera leur berger. Alors moi, le Seigneur, je serai leur Dieu, et mon serviteur David sera prince au milieu d’elles. Je suis le Seigneur, j’ai parlé. Ezéchiel parle d’une intervention directe de Dieu ; en même temps, Dieu annonce un nouveau David, un nouveau prince qui va paître le troupeau.
Cette promesse va rester une énigme jusqu’à la venue du Christ. Plusieurs passages du NT annoncent cet arrière-plan d’Ezéchiel. Mt 18, 12-14 : Quel est votre avis ? Si un homme possède cent brebis et que l’une d’entre elles s’égare, ne va-t-il pas laisser les quatre-vingt-dix-neuf autres dans la montagne pour partir à la recherche de la brebis égarée ? Et, s’il arrive à la retrouver, amen, je vous le dis : il se réjouit pour elle plus que pour les quatre-vingt-dix-neuf qui ne se sont pas égarées. Ainsi, votre Père qui est aux cieux ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu ; Allégorie du bon pasteur Jn 10, 11-16 : Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. Le berger mercenaire n’est pas le pasteur, les brebis ne sont pas à lui : s’il voit venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit ; le loup s’en empare et les disperse. Ce berger n’est qu’un mercenaire, et les brebis ne comptent pas vraiment pour lui. Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur.
C’est une manière de dire que cette promesse est réalisée ; Il annonce sa divinité. Le Christ est le nouveau David et c’est à travers Lui que Dieu intervient pour sauver son peuple.
Dans la deuxième partie du texte, le prophète s’adresse aux brebis. La responsabilité des chefs est énorme, mais, le peuple partage aussi cette responsabilité à un certain degré. Le peuple est responsable d’une relation où manquent l’amour et la solidarité ; une relation marquée par l’égoïsme (Ne vous suffit-il pas de boire une eau limpide ? Faut-il que vous troubliez le reste avec vos pieds ?) ; marquée par l’injustice et la violence (Ne vous suffit-il pas de paître dans un bon pâturage ? Faut-il encore que vous fouliez aux pieds ce qui reste du pâturage ?)
Dieu se met toujours du côté des pauvres et des faibles. Avec les brebis, avec le peuple, Il un jugement (Et toi, mon troupeau – ainsi parle le Seigneur Dieu –, voici que je vais juger entre brebis et brebis, entre les béliers et les boucs); mais aussi une promesse : il promet un règne de paix… une paix fondée sur la présence de Dieu qui se manifeste à travers la justice sociale, l’amour et la solidarité envers les pauvres.
Ce royaume où règne une paix pareille se réalise pleinement avec le royaume de Dieu en Christ. Les signes extérieurs de ce royaume sont toujours les mêmes (la transformation intérieure reste invisible) : la paix, la solidarité, l’amour, la préférence donnée aux pauvres…
Là est notre mission. Chacun a un rôle à jouer. Notre responsabilité première est la réalisation du royaume : montrer que nous sommes le troupeau du Seigneur. Cela exige un combat ; les tentations sont toujours les mêmes : l’égoïsme qui se manifeste à travers l’argent, l’économie… la tentation des chefs et des brebis entre elles ; et le pouvoir : exploiter les pauvres…; ne pas prendre la Parole de Dieu comme une référence surtout lorsque nous sommes au pouvoir. Parfois c’est pire quand on utilise Dieu pour nos propres convoitises et idées… (On peut penser aux tentations du Christ) ; la tentation est d’ « utiliser Dieu » pour nos propres projets, pour ce que nous voyons sur le plan politique, confessionnel… au lieu que Dieu soit la référence… il est l’instrument de la promotion des chefs…
Notre mission est d’être les signes du royaume, ce règne de paix, d’amour et de solidarité.
Dieu est là. C’est Lui qui donne cette victoire, qui réalise son royaume. C’est Lui qui sauve (nous coopérons). Je conclurai avec mes brebis une alliance de paix, je supprimerai du pays les animaux féroces, elles habiteront en sécurité dans le désert et dormiront dans les forêts. Nous ne sommes pas les sauveurs. Il faut accepter son royaume et l’autorité de son amour dans notre vie pour être ces signes puissants qui donnent vie. Lorsque le royaume se réalise, il y a les fruits.
Jour 7_Après-midi
Nous allons finir avec une méditation sur un texte de cette dernière partie du chapitre 40 à 48 consacrés à la reconstruction du temple et de Jérusalem. Comme souvent, Ezéchiel aime préciser la date, Ez 40, 1 : « La vingt-cinquième année de notre déportation, au début de l’année, le dix du mois, quatorze ans après la chute de la ville, en ce jour même, la main du Seigneur se posa sur moi. Il m’emmena là-bas ». Le même jour de la destruction de Jérusalem après 14 ans, Ezéchiel a eu cette vision. Il a quitté Jérusalem à 25 ans. Il a 50 ans maintenant. Le prêtre à l’époque vit son ministère entre 30 ans et 50 ans. Pour Ezéchiel, il n’a plus d’espoir de vivre son sacerdoce normalement, selon les coutumes. Il n’est plus revenu à Jérusalem. Il est uni à la souffrance de son peuple jusqu’au bout. Il n’annonce pas le message de l’espérance comme s’il est en dehors de cette souffrance.Ezéchiel annonce le renouvellement du temple et le décrit avec les moindres détails, avec les mesures… C’est difficile de comprendre les détails mais le message est là : il proclame un message d’espérance.
Le centre de son message est la présence de Dieu. C’est une présence qui agit là où elle est. D’abord, Ezéchiel a parlé de cette Gloire qui a quitté le temple : la destruction. Après, cette Gloire a accompagné le peuple dans l’exil : le renouvellement du peuple. Il a fait l’expérience de cette présence. Ici, il parle du retour de la Gloire de Dieu au temple.
Il y a beaucoup de symboles dans ces chapitres. La liturgie a emprunté ces détails : par exemple : la porte reste fermée, seulement le prince peut y entrer. La tradition orientale a vu dans cette porte fermée la virginité de Marie. Le Christ seul est passé par cette porte.
C’est une présence qui agit. Son retour au temple va être une abondance de vie. Ezéchiel finit son livre avec cette parole : « Le nom de la ville sera désormais : ‘Le Seigneur-est-là’ » (Ez 48, 35). C’est le résumé de son message.
Sa présence est source de vie abondante.
Ez 47, 1-12 : la source du Temple.
01 L’homme me fit revenir à l’entrée de la Maison, et voici : sous le seuil de la Maison, de l’eau jaillissait vers l’orient, puisque la façade de la Maison était du côté de l’orient. L’eau descendait de dessous le côté droit de la Maison, au sud de l’autel. 02 L’homme me fit sortir par la porte du nord et me fit faire le tour par l’extérieur, jusqu’à la porte qui fait face à l’orient, et là encore l’eau coulait du côté droit. 03 L’homme s’éloigna vers l’orient, un cordeau à la main, et il mesura une distance de mille coudées ; alors il me fit traverser l’eau : j’en avais jusqu’aux chevilles. 04 Il mesura encore mille coudées et me fit traverser l’eau : j’en avais jusqu’aux genoux. Il mesura encore mille coudées et me fit traverser : j’en avais jusqu’aux reins. 05 Il en mesura encore mille : c’était un torrent que je ne pouvais traverser ; l’eau avait grossi, il aurait fallu nager : c’était un torrent infranchissable. 06 Alors il me dit : « As-tu vu, fils d’homme ? » Puis il me ramena au bord du torrent. 07 Quand il m’eut ramené, voici qu’il y avait au bord du torrent, de chaque côté, des arbres en grand nombre. 08 Il me dit : « Cette eau coule vers la région de l’orient, elle descend dans la vallée du Jourdain, et se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux. 09 En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu’elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent. 10 Alors des pêcheurs se tiendront sur la rive depuis Enn-Guèdi jusqu’à Enn-Églaïm ; on y fera sécher les filets. Les espèces de poissons seront aussi nombreuses que celles de la Méditerranée. 11 Mais ses marais et ses bassins ne seront pas assainis : ils seront réservés au sel. 12 Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d’arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède. »
Nous continuons à découvrir les fruits de cette Pâque : le passage de la croix vers une abondance de vie. Ezéchiel a déjà annoncé le renouvellement du peuple, ainsi Dieu comme pasteur. Ici, il annonce l’abondance de la vie par l’eau qui coule du Temple : c’est une vie nouvelle, une vie divine.
L’eau est liée à la présence divine dans le Temple. Elle va arroser le désert et la terre va devenir comme un jardin d’Eden. Il faut noter que saint Jean l’évangéliste est très imbibé par Ezéchiel. Dans plusieurs textes johanniques, on voit un écho d’Ezéchiel. Jean considère le Corps du Christ Ressuscité : « Jésus leur répondit : « Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai. » Les Juifs lui répliquèrent : « Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce sanctuaire, et toi, en trois jours tu le relèverais ! » Mais lui parlait du sanctuaire de son corps » (Jn 2, 19-21).
De son Corps, de ce Temple, vont sortir du sang et de l’eau : « mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau » (Jn 19, 34). C’est le Temple nouveau d’où coule l’eau, la vie éternelle, la vie divine, la vie nouvelle. Plusieurs fois, Jean parle de cette eau, symbole de l’Esprit : « celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ; et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle » (Jn 4, 14) ; en Jn 7, 37-39 : Au jour solennel où se terminait la fête, Jésus, debout, s’écria : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit l’Écriture : De son cœur couleront des fleuves d’eau vive. » En disant cela, il parlait de l’Esprit Saint qu’allaient recevoir ceux qui croiraient en lui. En effet, il ne pouvait y avoir l’Esprit, puisque Jésus n’avait pas encore été glorifié ».
Jean reprend presque les mêmes termes : « Puis l’ange me montra l’eau de la vie : un fleuve resplendissant comme du cristal, qui jaillit du trône de Dieu et de l’Agneau. Au milieu de la place de la ville, entre les deux bras du fleuve, il y a un arbre de vie qui donne des fruits douze fois : chaque mois il produit son fruit ; et les feuilles de cet arbre sont un remède pour les nations » (Ap 22, 1-2) ; Ez 47, 12 : « Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d’arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède». C’est la même image reprise comme telle par Jean.
Ce Temple dont parle Ezéchiel est une figure du Temple à venir qui est le Corps du Christ Ressuscité et l’eau c’est l’Esprit-Saint. Il y a un progrès dans la vision d’Ezéchiel vis-à-vis de la liturgie : L’eau devient de plus en plus abondante en s’éloignant de la source contrairement à la nature. C’est une vie qui devient de plus en plus surabondante. Les arbres donnent fruits chaque mois et les feuilles sont des remèdes : il y a plusieurs interprétations entre autres : le peuple. Il s’agit d’un parallélisme avec le Ps 1, 1-3 : « Heureux est l’homme qui n’entre pas au conseil des méchants, qui ne suit pas le chemin des pécheurs, ne siège pas avec ceux qui ricanent, mais se plaît dans la loi du Seigneur et murmure sa loi jour et nuit ! Il est comme un arbre planté près d’un ruisseau, qui donne du fruit en son temps, et jamais son feuillage ne meurt ; tout ce qu’il entreprend réussira » …. Le peuple renouvelé par cette eau devient fructueux.
Nous notons aussi l’aspect d’universalisme : l’eau va arroser des régions hors JM.
Le miracle le plus grand est la puissance ou la force de cette eau, de cette vie. Là où elle passe, elle donne la Vie ; C’est la victoire sur la mort. Cette eau coule vers la région de l’orient, elle descend dans la vallée du Jourdain, et se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux. En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu’elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent
Le désert, la mer Morte sont les règnes de la mort. Au désert, aucune plante ne peut vivre. Dans la mer Morte, aucun genre de poisons ne peut vivre… la mort est un manque de vie. Au désert, on aura toujours la chaleur. Mais puisque cette eau le traverse, la terre devient un jardin d’Eden. Dans la mer Morte, on aura toujours le sel ; mais grâce à cette eau qui passe les poissons pourront vivre et foisonner.
La source de cette vie est la présence de Dieu surtout dans le Temple. Quelle révolution dans la vision de la liturgie ! Ce n’est plus un culte extérieur. C’est une vie qui triomphe sur la mort. Le désert et la mer Morte deviennent des oasis de vie. C’est une autre vision du Temple et de l’adoration. Il s’agit d’être nourri de cette eau pour pouvoir la porter.
Comment vivons-nous la liturgie ou la présence de Dieu ?
Par la liturgie (la présence de Dieu) nous découvrons cette force qui nous est donnée gratuitement. La piété n’est pas de l’ordre sentimental ou individuel. Nous découvrons avec Ezéchiel la force transformante de la liturgie, de l’adoration. Pas seulement une transformation de la personne mais de l’univers où règne la mort. Il y a beaucoup de déserts autour de nous. Mais, nous avons la Source.
D’où l’importance de redécouvrir ces dimensions de la liturgie (pas seulement les prières. Il y a la Parole, l’Eucharistie…). Elle n’est pas séparée du monde ou une fuite du monde. C’est tout à fait le contraire ; C’est cette Source, seule, qui peut renouveler le monde, qui peut transformer le monde en nous transformant.
Ce sont les gens pleins de l’Esprit qui peuvent transformer le monde. On a la Source de l’espérance ! Et c’est gratuit. C’est à notre portée.
Comment vivre cette Vie et la transmettre ? Quel sens donnons-nous à notre engagement, là notre mission ?…
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