Avec Marie-Madeleine, tout est là de la foi pascale, de la foi à croire et de la foi qui fait croire, de la foi et de l’expérience chrétiennes : la foi comme recherche, la foi comme transformation, la foi comme rencontre pour n’esquisser que ces trois directions. Tout notre évangile met en valeur chez Madeleine la réalité du désir qui met en recherche et s’exprime dans l’ardeur, dans l’audace, dans la course que rien n’arrête mais aussi dans la veille de celle qui pleure et sait regarder à l’intérieur. La réalité du désir se joue aussi dans la dualité de l’absence et de la présence et sollicite tous les sens : la vision qui voit sans reconnaître puis reconnait sans pourtant voir davantage, l’ouïe et la parole qui font entrer en dialogue et reconnaître celui qui la nomme et la connait, le toucher qui ne peut contenir ni arrêter celui que rien ne contient ni ne peut circonscrire. Ensuite, son chemin de transformation est un chemin de conversion qu’exprime avec force le jeu des retournements dont le plus fondamental est celui de la reconnaissance par Marie du Rabouni qu’elle n’avait d’abord pas vu puis vu sans le reconnaître mais aussi celui du non savoir au savoir qui ne sait pas ! Enfin, la foi est une rencontre : rencontre avec le Bien-Aimé dont on a souligné tout le paradoxe et l’ardeur ; rencontre auprès des disciples dont elle est la première messagère « apôtre des apôtres ». Ainsi la foi comme rencontre conduit à tout un jeu de rencontres : la foi est kérygme et expérience « j’ai vu et voici ce qu’il m’a dit ». Avec Madeleine, tout est là de la foi pascale que l’on pourrait symboliser par ce « ne me retiens pas (…) va ».
On sait combien la figure a traversé toute la Tradition chrétienne qui a pu l’alourdir, l’enrichir d’autres figures évangéliques. Le Carmel se l’est – se les est – approprié(es) également. On sait le rapport profond entre les deux Thérèse et Madeleine. Madeleine était présente lors de la conversion de la Madre qui l’a toujours prise comme modèle. Madeleine l’a à la fois stimulée mais aussi accablée car disait-elle Madeleine, elle, s’est convertie en une seule fois. La petite Thérèse a vu en Madeleine une rivale, la rivale amoureuse celle qui avait aimé plus que tout autre. Combien Thérèse voulait faire mentir cette appellation… Mais voilà, Madeleine avait beaucoup aimé car on lui avait beaucoup pardonné d’où sa méditation si forte sur la miséricorde de prévenance. Mais si Madeleine parle tant au Carmel c’est aussi pour le jeu de l’Ecriture qu’elle suscite : accomplissement du livre du Ct, danse des figures de l’évangile quitte à embrouiller les pistes et énerver les historiens. Peu importe, figure de la foi qu’elle concentre, rivale et modèle, elle stimule notre foi et nous entraîne dans ce jeu de recherche ardente et paradoxale, de conversion et de témoignage qu’est la vie chrétienne. Amen.
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