« Où achèterons-nous des pains pour que mangent ces gens ? »
Jésus porte cette question ! Elle l’habite, devant les foules qui le suivent à la vue des signes de guérisons opérées ; elle l’habite aujourd’hui encore.
Ce questionnement adressé à l’un des disciples s’avère une « mise à l’épreuve » (v. 6), comme pour le peuple au désert, à travers Moïse : « Où trouverais-je de la viande à donner à tout ce peuple, quand ils m’obsèdent de leurs larmes ? » (Nb 11, 13). L’expérience du manque peut faire monter en nous un questionnement qui trahit le doute : « Si l’on égorgeait pour eux petit et gros bétail, en auraient-ils assez ? Si l’on ramassait pour eux tous les poissons de la mer, en auraient-ils assez ? » (Nb 11, 22). L’histoire se répète-t-elle, inexorablement ? L’abîme du doute se creuserait-il toujours davantage, car dans la bouche de Philippe, le questionnement fait place à une affirmation sans attente : « Deux deniers de pain ne suffisent pas pour que chacun en reçoive un petit morceau » (Jn 6, 5). Mais la communauté semble pour lui chemin de salut. Car il est un frère à ses côtés qui a entendu : « Il y a ici un enfant, qui a cinq pains d’orge et deux poissons » (V. 9). Grâce du frère qui au sein de la communauté perçoit ce qui est de l’ordre du peu, fut-il lui aussi traversé par le doute (« Mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ? »). Car du peu, offert à Dieu, jaillit la vie, telle est la logique divine. Ce peu que nous lui donnons, Jésus le tient dans ses mains, l’offre au Père, en rendant grâce, et le reçoit, en retour, des mains du Père, « pain de Dieu qui donne la vie au monde » (Jn 6, 34).
Par Lui, avec Lui, et en Lui, « nous avons à devenir une brèche, un passage… ».
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