Il y a peu, quelqu’un rappelait que le peuple juif n’est pas le peuple du Livre, mais celui de l’interprétation du Livre. C’est aussi valable pour les chrétiens. La parole n’est vivante qu’à être interprétée, partagée, commentée, traduite sans cesse et de manières renouvelées. Mais on ne peut se passer de balises pour ne pas la manipuler de façon erronée. Certainement en la confrontant avec d’autres textes de la Bible, mais aussi aux sœurs et frères de la communauté d’humanité et de foi.
C’est bien ainsi qu’opère Jésus. À la question, il ne rétorque pas au légiste par un « tu dois » ou « c’est comme ça ». En bon juif, il lui répond en ouvrant le dialogue par une question.
Allons au cœur du texte. Pour nourrir le colloque, Jésus fait le détour par une parabole : l’histoire nous est bien connue. Jésus ne fait aucun commentaire au sujet du bandit. Il sait mieux qu’un autre qu’on est parfois roulé dans la poussière, roué de coups et voué tout entier à notre vulnérable condition d’humain. Incroyable Dieu, Dieu inédit que celui qui assume cela pour lui-même.
Ce n’est peut-être plus tant au niveau de la vulnérabilité que le bât blesse. […] Une fois à terre, ce qui importe par-dessus tout, c’est de trouver pencher vers soi des visages qui relèvent en nous notre dignité, celle qui me réintègre à la communauté humaine lorsqu’un accident de la vie m’a fait craindre d’être exclu. La dignité qui signifie que je suis né humain et que je le demeurerai vêtu ou dévêtu, debout ou à terre.[1]
Cette parabole du bon Samaritain définit d’abord par la négative ce que c’est que ne pas être le prochain : c’est passer outre. Tandis qu’être un prochain, c’est accepter la réalité de sa présence et y apporter une réponse adéquate. C’est être impliqué. Cela peut passer par le fait d’être « ému aux entrailles ». Mais lorsqu’aucune émotion ne nous pousse vers l’autre, souvenons-nous que c’est la loi de Dieu qui nous convoque ensemble.[2]
[1] cf. Marion Muller-Colard, Éclats d’Évangile
[2] Idem
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