Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu…
« Aveugle, regarder, œil, tu verras clair… »La thématique du regard est centrale dans cet évangile !
Quel regard portons-nous? Un regard qui juge ou pardonne? Un regard indifférent ou attentionné? Un regard arrêté aux préjugés et aux apparences ou à la nouveauté? Un regard « aveugle » vis-à-vis de soi et de l’autre qui ne voit que la paille dans l’œil du frère?
Luc précise que « le disciple n’est pas au-dessus du maître; tout disciple accompli sera comme son maître » (v. 40); se former à l’école de Jésus, c’est se laisser convertir par sa miséricorde pour les pécheurs qui l’a rendu apte à guider les autres. Etre son disciple, c’est avoir le cœur pur pour regarder comme Dieu lui-même regarde; c’est voir le Christ dans les autres. C’est tout un chemin de purification intérieur, un chemin de Vérité devant Dieu, devant soi et devant les autres.
Bienheureux sommes-nous lorsque nous arrivons à regarder l’autre comme un miroir de ce que nous vivons: sa faiblesse, son péché, sa blessure sont les nôtres. Là, notre regard ne dénonce plus la nudité de l’autre mais le couvre du manteau de la miséricorde, voit le « Beau » en lui. A chaque fois que nous laissons la miséricorde de Dieu nous modeler, nous transformer et nous purifier, nous pouvons vivre la compassion fraternelle avec toute sa beauté créatrice et ses exigences. Authentiques, nos rencontres deviennent transformantes, des Visitations. L’Amour transfigure et libère.
Un commentaire
« UN AVEUGLE PEUT-IL GUIDER UN AUTRE AVEUGLE ?… ENLÈVE D’ABORD LA POUTRE DE TON ŒIL ; ALORS TU VERRAS CLAIR POUR ENLEVER LA PAILLE QUI EST DANS L’ŒIL DE TON FRÈRE » (Lc 6, 39-42). Juger nous semble nous toujours facile, surtout quand il s’agit de le faire envers les autres. Mais, juger n’est pas tant une mauvaise chose en soi, particulièrement dans les cas où nous ne nous arrêtons pas simplement à condamner, à critiquer ou à vouloir détruire. Car, le véritablement jugement, celui qui cherche le bien et le Salut de l’autre, est le signe d’un regard attentionné, d’un œil discret, qui voit clairement la faute, l’erreur, la limite ou encore la faiblesse de l’autre et tâche d’en interpeler le concerné. Et un tel regard ne peut être pur et clair que s’il est lui-même dépouillé de toute souillures, s’il n’est pas empêché par une poutre. Dans ce cas, la charité veut que nous commencions par purifier notre cœur et notre regard, éliminer tout obstacle sur notre chemin, en enlevant d’abord la poutre de notre œil. Cette poutre peut être la rigidité avec laquelle nous jugeons les autres ou encore le négatif que nous avons sur eux en permanence, et qui nous empêche de voir le bien en eux, mêmes quand ceux-ci s’efforcent de bien agir envers nous. L’amour est une valeur dynamique et réciproque, qui s’améliore et se perfectionne dans la mesure où nous nous efforçons de la cultiver autour de nous. Et cet amour miséricordieux guérit d’une cécité radicale, celui qui apprend à être plus souple et humble, celui qui s’efforce de se corriger soi-même en corrigeant le regard qu’il porte sur les autres. Or, cette purification permanente du cœur, de la raison, des pensées et du regard est aussi le chemin qui conduit progressivement à avoir, sentir, comprendre et agir à la manière de DIEU. Celui qui s’efforce avant d’enlever la poutre de son œil, afin de voir clair, s’efforce en fait de ressembler à DIEU. Car, la poutre est un obstacle qui crée la confusion du regard, empêche de voir avec clarté et discernement. Donc, la poutre se pose en ennemi de la lumière, de la clarté, de la pureté, c’est-à-dire de la sérénité et de la confiance en soi. Celui qui ne parvient pas à bien distinguer ce que la nature nous montrer avec clarté, court le risque de devenir disciple des ténèbres. C’est pourquoi notre conversion permanente passe aussi par une véritable purification des sens. Car, c’est par eux que l’Homme établit une véritable connexion avec le monde. Sans cette connexion claire et distincte, nous devenons des aveugles ambulants, sans bâtons ni repères, exposés à des loups plus habiles et malins. Bonne journée de méditation et de travail
Abbé ACHILLE KANDI, Archidiocèse de Bertoua