Célébrer sainte Brigitte après sainte Marie-Madeleine, n’est-ce pas retrouver la Passion après être demeurés hier dans le jardin de la résurrection ? Mais de ce jardin, il n’est pas question d’expulsion : un peu comme le château de Thérèse, il s’agit d’en explorer toutes les parties selon une logique du va-et-vient et de l’approfondissement qui n’est pas simplement chronologique. Quel est le secret de la vie promise et pleinement accomplie en Christ ? La liturgie de la Parole nous fait méditer sur le don et la volonté de Dieu, sorte de boussole et d’outil de mesure du sens, de la saveur et de la valeur de notre vie.
La mise en scène de l’évangile oppose de manière suggestive un groupe à l’extérieur de la maison, qui cherche mais reste en dehors, et le groupe de ceux qui, à l’intérieur de la maison, sont en relation avec Jésus qu’ils regardent et écoutent en cercle autour de lui. La volonté de Dieu ne nous est pas étrangère ni extérieure mais, à l’instar du Royaume, au milieu de nous : « ce que Dieu veux, c’est ce que tu veux ! » Que l’on pense aux questions de Jésus dans l’évangile : « que cherches-tu ? » « que veux-tu ? » Et pour cela « pourquoi pleures-tu ? » etc. Notre désir nous est à vrai dire parfois étranger à nous-mêmes, quand on confond désir et envie, volonté et quatre volontés, volonté propre et propre volonté. Connaitre la volonté de Dieu passe donc pas un détour souvent laborieux et éprouvant : « non pas ce que je veux mais ce que tu veux ». Ce détour est celui de notre libération, de notre transformation que met en route ce constat de Paul : le Christ « m’a aimé et s’est livré pour moi », sorte de don originaire ou dissymétrie fondamentale et vertigineuse, source de tout don et de toute liberté, moteur de toutes nos réponses et de nos libérations. Oui il nous faut sans cesse revenir à la profondeur de la Passion pour prendre la mesure de l’ampleur du jardin de la résurrection. Pas de don de soi, source de toute liberté et de discernement de la volonté de Dieu sans l’accueil du don de Dieu seul libérateur des entraves de notre cœur. Jean de la Croix l’exprime à merveille dans cette phrase de feu prononcée au seuil du jardin mais dans un regard rétrospectif sur tout le chemin, énoncé audacieux du paradoxe assumé entre volonté de Dieu et volonté de l’homme. Je lui laisse la parole : qu’elle nous entraîne dans cette recherche inlassable de cette volonté. « Maintenant que je suis si fortifiée en amour d’où vient que je Te demande ce que Tu veux que je demande et ne demande pas ce que Tu ne veux pas, et même ne le puis et ne me vient point en la pensée de le demander – puisqu’aussi, mes demandes sont désormais plus efficaces et de plus grand prix devant tes yeux, comme venant de Toi qui m’incites à les faire et que je Te le demande avec goût et joie au Saint-Esprit – mon jugement sortant désormais de ton visage ?
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