La Philosophe Simone Weil écrivait dans « La pesanteur et la grâce » : « être rien pour être à sa vraie place dans le tout ». Elle nous invitait, comme le texte de l’Évangile nous invite aujourd’hui, à repenser notre place et notre être si petit, dans sa relation à Dieu, à l’univers, au cosmos : « Qu’est-ce que l’homme, Seigneur, pour que tu penses à lui, que tu en prennes souci ? » (Ps 8). Petits… certes, mais jamais écrasé car le Seigneur ne se positionne jamais en surplomb ou en dominant, mais choisit la vulnérabilité et la dépendance comme mesure. De notre petitesse il en fait une grandeur et nous appelle à la confiance et à l’abandon.
Alors que Jésus annonce sa mort et sa Passion à ses disciples, alors qu’il leur explique son anéantissement — non seulement par son Incarnation « Dieu fait homme », mais jusqu’au don de sa vie par sa mort ignominieuse sur le supplice réservé aux malfaiteurs, les disciples tergiversent et se disputent sur leur velléité à s’élever. Rien à voir avec la voie du service et de l’abaissement que leur annonce Jésus.
En bon pédagogue, Jésus n’insiste pas sur l’image de la croix, car ils la contempleront en leur temps, après la Résurrection et sa glorification. En attendant, il leur montre un modèle. Un modèle inattendu que leur société délaisse et méprise, un modèle déprécié, un modèle sans poids aucun, un « infans » en latin celui « qui ne parle pas », un sans parole. Jésus prend un enfant qu’il place au milieu d’eux, comme modèle référent. Il l’embrasse, il leur montre que ce tout-petit est aimé et à du prix aux yeux de Dieu, que l’amour divin est absolument gratuit et sans lien aux mérites ou aux critères humains. Et il leur demande d’accueillir en son nom cet enfant Ainsi, du plus bas de l’échelle humaine, sociétale, sociale, religieuse, Jésus relie le plus petit au plus Grand, c’est-à-dire à la Personne divine du Créateur. C’est lui, c’est son Père qui sont accueillis en cet enfant et en tout serviteur.
Dieu ne nous voit que dans notre humilité, ses yeux ne sont que pour nos abîmes (les cimes babyloniennes, les tours de Babel, il les fait écrouler !). Aujourd’hui, prenons le temps de contempler les petits de la Bible, prions avec le Magnificat, le Dieu qui se penche sur nous , qui élève les humbles et qui relève ses serviteurs.
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