Les disciples auxquels s’adresse Jésus ne rêvent-ils pas de« gagner l’univers » ? ( v.26 ) Pour preuve leurs interrogations à propos du « plus grand », la demande des fils de Zébédée pour les premières places, ou encore la réaction de Pierre qui précède notre péricope de ce jour. Serions-nous différents ? Certes non !
« Oh qui pourrait faire comprendre ce qu’est ce conseil que nous donne ici notre Sauveur, de nous nier nous-mêmes… » ? (Jn de la + M.II, 7 § 5)
« Lui qui de condition divine ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu , mais s’anéantit prenant la condition de serviteur…, c’est pourquoi Dieu l’a élevé… » (Phil 2 ) Non, notre Dieu n’est pas du côté de la mort !
Le Fils Unique du Père l’a traversée pour que nous ayons la Vie. La Parole de ce jour nous y appelle de toute sa force. (v. 25 – 26) Mais son exigence n’est audible que dans la foi en Celui qui, librement et jusqu’à l’extrême de l’Amour, est passé devant nous pour nous ouvrir le Chemin. Le paradoxe de la vie du disciple, clairement exprimé par Jésus, plonge ses racines dans celle du Maître. Tel le « trésor » dans le champs ou la « perle de prix » il faut tout vendre pour l’acquérir ; et déborde la joie… Jésus, « l’Homme qui marche », nous invite à le suivre, « légers », « soulevant » (v. 24) le seul bâton de la croix : notre humanité fragile, blessée, mais sauvée dans la Sienne. Ainsi porte son grabat le paralytique ( Mc 2,11) et l’infirme de Béthesda le sien (Jn 5,8 )
… Que le spirituel « ne demeure embarrassé pour marcher en ce chemin étroit; puisque, comme donne à entendre le Sauveur, il n’y peut tenir autre chose que l’abnégation et la croix, qui est le bâton pour y monter, lequel allège et facilite beaucoup ce chemin. » Jn de la + M II, 7)
Seigneur donne-nous de « marcher à ta suite », libres et légers, les yeux fixés sur Toi, « sans appui et pourtant appuyés », ( Jn de la +), sûrs que tu es « le Chemin, la Vérité et la Vie » nous entraînant vers le Père.
« Faisons route ensemble, Seigneur !
Où que tu ailles il me faut aller ; où que tu passes, il me faut passer »( Th. de J. Ch. 26 § 6 )
Un commentaire
« SI QUELQU’UN VEUT MARCHER A MA SUITE, QU’IL RENONCE A LUI-MEME, QU’IL PRENNE SA CROIX ET QU’IL ME SUIVE… QUEL AVANTAGE UN HOMME AURAIT-IL A GAGNER LE MONDE ENTIER, SI C’EST AU PRIX DE SA VIE ? » (Mt 16, 24-28). Rien ne vaut la vie, c’est pourquoi elle mérite d’être vécue. Mais, notre vie ne tient qu’à souffle. Pourtant, tant de luttes familiaux, de conflits ethniques, de guerres inutiles et de compromissions, pour une ascension sociale ou pour préserver la vie. La course au pouvoir, aux richesses ou encore la volonté de gagner le monde entier, peut parfois porter l’Homme à se compromettre, même au prix de son âme, pour une joie éphémère. Quand la vanité du monde devient malheureusement notre dieu, nous perdons le sens et la valeur réelle des choses. Même les disciples de JÉSUS n’ont pas échappé à cette tentation, quand certains cherchaient les premières places, tandis que d’autres se demandaient qui étaient le plus grand entre eux. Même si chaque engagement, chaque chemin entrepris exige des renoncements, le discernement doit être la clé qui guide et oriente notre renoncement. Gagner le monde entier au prix de son âme, ce n’est pas vraiment gagner ; bien au contraire, cette compromission nous plonge encore plus dans le désarroi, à cause de l’excès d’égoïsme. Si le renoncement implique un sacrifice, ce sacrifice en vaut la peine, dans la mesure où il nous ouvre à un plus grand bien, puisque, ce qui a été perdu au départ, est retrouvé et le gain multiplié. Car, qui perd sa vie à cause du CHRIST la trouvera. Perdre sa vie, c’est savoir renoncer à sa suffisance, renoncer à vivre exclusivement fermé sur soi, renoncer à tout ce qui ne contribue pas à notre progrès ou à notre croissance, renoncer aussi à exclure les autres. Mais, renoncer c’est aussi le signe d’un nouveau départ, où l’Homme accepte de prendre sa croix quotidienne, pour suivre le CHRIST sur les chemins de la Justice, de la Vérité, de la Charité et de l’Amour. Et seule la foi, l’espérance, la confiance, mais surtout l’humilité, peuvent nous faire changer de voie, quand nous avons emprunté le mauvais chemin. Ainsi, après la série de miracles accomplis par le CHRIST, pour le bien des hommes et l’évaluation faite hier du chemin déjà parcouru et de la véritable identité du CHRIST qui s’éclaire et se confirme, il est maintenant temps de repartir avec DIEU, non plus sur des chemins de compromission, où l’Homme veut tout amasser pour soi, mais repartir sur de nouveaux chemins, où nous devons suivre le CHRIST, sur les chemins de la passion ; car c’est là que se réalise pour nous le Salut véritable, et non sur de fausses sécurités, éblouissantes, mais vides de sens. Bonne journée de méditation et de travail
Abbé ACHILLE KANDI, Archidiocèse de Bertoua