Dans notre vie de foi, la mémoire du cœur est décisive.
La Parabole proposée par Jésus en réponse à la question de Pierre (« Seigneur, combien de fois mon frère pourra-t-il pécher contre moi et devrai-je lui pardonner ? Irai-je jusqu’à sept fois ? » Mt 18, 21) nous le redit.
Dans la mémoire du serviteur surendetté, l’angoisse de la sentence (« le maître donna l’ordre de le vendre, avec sa femme, ses enfants et tous ses biens » V 25) semble avoir effacé la réalité vécue, celle de l’inouï de Dieu : au pied de « son maître », figure du Père, et implorant de lui un délai, il reçoit en surabondance la remise de toute sa dette ! Après avoir quitté son maître, croisant un compagnon endetté lui aussi, il se voit adresser une demande lui donnant de réentendre ses propres mots : « Consens-moi un délai ». Mais l’expérience vécue de la compassion du Père demeure ensevelie ; elle ne refait pas surface, alors qu’en elle, s’enracine la compassion envers son frère.
Le pardon du frère, « du fond du cœur », s’enracine dans le pardon de Dieu. Mais tant d’aléas et de blessures humaines nous empêchent de nous recevoir comme des êtres pardonnés, ce que nous sommes foncièrement. Sachant cette limite, il nous reste à ne pas nous tromper de lieu de combat. Car le pardon du frère, « du fond du cœur », n’est pas au bout de nos efforts humains. Il est le fruit d’un pardon reçu, reçu de Dieu.
Que la prière et la solitude nous donnent de nous réchauffer au feu de Dieu, afin de retrouver ce que nous sommes par pure grâce, des êtres pardonnés. Delà surgira un pardon possible, du fond du cœur.
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