Élevés à la place de l’ami
Nous entrons dans les heures sombres et troubles de la Passion… C’est l’Heure de Jésus mais c’est aussi notre heure, celle du choix. Et l’Evangile de ce jour braque le projecteur sur les disciples à ce moment décisif.
Tout d’abord, Judas, « l’un des Douze ». Déçu sans doute par la figure paradoxale du Messie, incarnée dans la pratique inattendue de Jésus, Judas livre son Maître. Mais ce n’est pas un rabbi ordinaire : il le vend pour le prix de l’esclave, une somme dérisoire. « Ils pesèrent mon salaire : trente sicles d’argent. Mais le Seigneur me dit : Jette-le au trésor, le beau prix auquel ils m’apprécient » (Zacharie 11, 12-13). Matthieu nous donne de mesurer la faiblesse et la vulnérabilité de Dieu en Jésus. Lui qui déclare à son peuple : « Ne crains pas, je t’ai libéré ; je suis ton sauveur. Tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et moi je t’aime… » (Isaïe 43, 1-4). Ce Dieu-là, le voici méconnu et déprécié, ligoté par le refus des siens, réduit à l’impuissance par cette rupture de l’Alliance, toujours brisée par l’ingratitude, toujours et inlassablement redonnée par la tendresse et l’amour fou de Dieu pour nous.
Mais ce n’est pas seulement Judas… Il y a tous les proches au cœur incertain et qui s’interrogent, saisis par le doute. « L’un de vous va me livrer. Ils se mirent chacun à lui dire : Serait-ce moi, Seigneur ? ». La trahison, le reniement s’expriment ici comme ce malheur, toujours possible, de se fermer au don, de se laisser déchoir de la grâce qui s’offre : « Il a plongé la main avec moi dans le plat, celui qui va me livrer ».
Et Jésus dresse la table du repas de l’Alliance, pour nous ses disciples, pour chacun d’entre nous qu’il invite, non pas au rang de serviteur, mais élevé à la place de l’ami : « Mon temps est proche, c’est chez toi que je célèbre la Pâque avec mes disciples ».
Un commentaire